Territoire précurseur en matière de supracommunalité, la Wallonie picarde est régulièrement citée en exemple par les autorités wallonnes. Récemment, c’est à l’occasion d’un colloque organisé par l’Union des Villes et Communes de Wallonie qu’elle a partagé son expérience à la demande du Ministre des Pouvoirs locaux Christophe Collignon.
Supracommunalité constitutionnelle, intercommunalité, ou encore coopération supracommunale. Comment concilier et concerter au mieux les intérêts communaux sur les territoires de plusieurs communes ? Pour apporter des éléments de réponse et nourrir les échanges, Corinne Billouez, Co-présidente du Conseil de développement de Wallonie picarde et Pierre Wacquier, Président de l’asbl WAPI 2040 se sont prêtés à l’exercice du retour d’expérience.
La supracommunalité en Wapi, comment ça marche ?
C’est autour de son Projet de Territoire que la Wallonie picarde a construit son modèle de supracommunalité. Un document stratégique, fruit d’un travail collaboratif et dont les six axes prioritaires guideront la Wallonie picarde dans son développement au cours des deux décennies à venir. Côté structures, c’est le Conseil de développement pour la composante société civile et la Conférence des bourgmestres et élus territoriaux pour la composante politique qui donnent corps à la démarche. Le tout, avec le soutien technique et logistique de l’asbl WAPI 2040. Loin d’être figée, la supracommunalité en Wallonie picarde est source de multiples enjeux comme l’ont expliqué Corinne Billouez et Pierre Wacquier.
- Dans un contexte où les ressources financières et humaines doivent être utilisées avec parcimonie, la supracommunalité permet de mettre en commun les énergies et les moyens pour générer des économies d’échelles et offrir aux citoyens les meilleurs services. L’obtention d’un PET Scan grâce à l’association de trois institutions hospitalières du territoire en est une très bonne illustration.
- Fédérer un territoire et renforcer sa cohérence et son identité passe inévitablement par la mise en œuvre de projets d’envergure supracommunale. Parmi ceux-ci, « Un arbre pour la Wapi » qui ambitionne de planter 350.000 arbres à l’horizon 2025 est sans conteste le plus emblématique.
- Travailler en supracommunalité, c’est aussi se donner la capacité de faire front, ensemble, face aux crises. Pour la Wallonie picarde, cela s’est clairement vérifié au cours de la crise sanitaire avec la création de la Task-force Covid Wapi qui a permis la mise en œuvre de solutions rapides et concertées. C’est aussi à l’échelle de l’ensemble de son territoire que la Wallonie picarde a souhaité régler la question de l’accueil des réfugiés ukrainiens.
- Enfin, choisir la voie de la supracommunalité, c’est miser sur sa faculté à se mettre en ordre de marche pour saisir les opportunités. On pense ici, notamment, aux projets labellisés Wapi déposés dans le cadre de la programmation 2021-2027 du FEDER. C’est aussi une manière de faire valoir ses revendications puisque quand cela s’avère utile, le Conseil de développement et la Conférence des bourgmestres et élus territoriaux n’hésitent jamais à prendre attitude sur des sujets essentiels par le biais de motions comme ce fut le cas pour la demande d’agrément pour la technologie PET Scan, la demande de libération d’Olivier Vandecasteele et plus récemment la demande de co-habilitation de Master en Médecine en Hainaut de l’UMons.
Quelles leçons retenir de tout cela ?
La Wallonie picarde peut se targuer d’un bilan positif quand elle se retourne sur les quinze années écoulées. Progressivement, la notion de « Wapi » a pris essence dans toutes les composantes du territoire pour voir émerger un sentiment d’appartenance qui ne cesse de grandir. La mobilisation des forces vives et politiques a permis un développement à 360° touchant toutes les thématiques sociétales. Un développement qui se matérialise par des réalisations concrètes et des collaborations fructueuses entre acteurs issus de tous les horizons. C’est précisément cette diversité qui fait la force du territoire et qui, au passage, a permis de rétablir un dialogue parfois difficile entre le monde politique et la société civile.
Pour autant, tout n’est pas toujours simple et des points d’attention subsistent. Les mandataires communaux doivent parfois se mettre dans la peau d’un équilibriste pour ne pas froisser l’autonomie communale. D’où la nécessité de faire preuve aussi de pédagogie. Et lorsque l’on rentre dans le concret des dossiers, il est également pertinent de s’interroger sur l’échelle la plus judicieuse pour le traiter. Enfin, impossible pour les intervenants de conclure sans attirer l’attention sur l’absence de financement structurel qui place parfois les structures œuvrant en faveur de la supracommunalité dans une position inconfortable. Cette question mériterait selon eux de faire l’objet d’une réflexion pour pérenniser ces démarches pilotes.