En Wallonie picarde, l’adoption du SDT par le précédent Gouvernement wallon a du mal à passer. Et pour cause, les revendications émises par le territoire dans le cadre de l’enquête publique menée à l’été 2023 sont pour la plupart restées lettre morte. Pas de quoi pour autant démobiliser les Villes de Tournai et de Mouscron, ainsi que l’asbl Wallonie picarde qui, avec le soutien des intercommunales IDETA, IEG et IPALLE, ont décidé d’introduire conjointement une requête en annulation devant le Conseil d’État.
Document éminemment stratégique, le SDT définit les objectifs régionaux en matière de développement territorial et d’aménagement du territoire. Ses implications en termes de développement socio-économique, d’attractivité, de cadre de vie ou encore de mobilité sont donc nombreuses. Si de manière générale, la Wallonie picarde partage les ambitions du SDT, elle voit néanmoins d’un très mauvais œil le fait que ses spécificités territoriales soient passée sous silence. Consciente que cette situation risque à l’avenir d’entrainer une concentration des investissements et des subsides dans les autres territoires wallons, la Wallonie picarde entend défendre sa place sur l’échiquier wallon.
La Wapi revendique la reconnaissance d’un bipôle majeur transfrontalier Tournai-Mouscron
Un premier sujet de mécontentement est la non-reconnaissance du bipôle majeur transfrontalier Tournai-Mouscron. Une décision d’autant plus incompréhensible que les données de l’IWEPS sur lesquelles se base le Gouvernement wallon pour la détermination des pôles majeurs (l’intensité économique, les équipements en services à la population et le tourisme) placent les villes de Tournai et de Mouscron dans le profil requis au même titre que les villes de Mons, Charleroi, Namur et Liège.
Cette reconnaissance est d’autant plus essentielle qu’elle guidera les futures décisions quant aux investissements stratégiques wallons. À défaut, la Wallonie picarde risque en effet de voir se réduire comme peau de chagrin les moyens octroyés pour le développement et le maintien sur son territoire d’infrastructures et de services publics. La possible délocalisation des lieux de justice de Tournai vers Mons a été évoquée en son temps par le Ministre de la Justice. Plus récemment, le plan de restructuration de l’ONEM laisse entrevoir une délocalisation des bureaux de chômage de Tournai et de Mouscron vers Mons. Tout cela incite les élus de Wallonie picarde à la plus grande vigilance d’autant qu’il ne s’agit là que deux exemples parmi d’autres. En effet les implications sur bon nombre d’autres services sont bien réelles, notamment au niveau de la programmation des investissements de l’Office des Transports Wallons (OTW).
Un coup de frein au développement socio-économique du territoire
Seconde pierre d’achoppement : la non-reconnaissance de l’axe Lille-Bruxelles comme « aire de développement relais » avec là aussi des impacts négatifs à redouter principalement en termes d’emploi et d’investissements stratégiques futurs.
Or, cet axe est un vecteur de développement et d’attractivité majeur et draine un flux économique de premier plan entre la Région Hauts de France, la Wallonie et Bruxelles, ainsi que la Flandre, grâce aux parcs d’activités économiques situés sur le long de cet axe majeur, comme Tournai-Ouest, Mouscron, Dottignies, Leuze-Europe, Orientis ou encore le Qualitis Science Park d’Enghien.
Une atteinte au principe de l’autonomie communale
Un autre grief formulé à l’encontre du SDT est la remise en cause de l’autonomie communale. Et pour cause, les centralités identifiées réduisent drastiquement les potentialités de développement de nombreuses zones du plan de secteur. Et cela sans donner aux communes la possibilité d’adopter un outil d’aménagement susceptible de retrouver des potentialités équivalentes. Une situation qui met à mal l’autonomie communale et qui constitue une violation du plan de secteur. Cela freinera l’évolution immobilière dans de nombreuses communes en modifiant les dynamiques d’acquisition immobilière.
Le recours ayant été jugé recevable par le Conseil d’État, les villes de Mouscron et de Tournai et l’asbl Wallonie picarde appellent les autres villes et communes wallonnes à rejoindre le mouvement. Celles-ci ont à compter du 9 septembre, date de la publication de l’avis au Moniteur belge, soixante jours pour intervenir à la procédure et appuyer un ou plusieurs moyens de la requête en annulation.
Les Collèges communaux de Wallonie picarde qui le souhaitent peuvent également marquer leur soutien à la démarche par le biais d’une délibération. Bien que celle-ci n’ait pas de valeur juridique, elle contribuera à démontrer la cohésion du bassin de vie qui, une fois encore, est déterminé à faire bloc pour protéger ses intérêts et par là ceux de ces 355.000 habitants qui méritent une meilleure reconnaissance et un arrêté du Gouvernement wallon relatif au SDT plus abouti.